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Chronique « Livres»:2019 – 2022:rien que la lutte contre la corruption et le combatpour la survie de mon pays

Dans cette chronique hebdomadaire, nous vous présenterons chaque semaine un extrait du livre : « 2019 – 2022 : rien que la lutte contre la corruption et le combat pour la survie de mon pays » écrit par l’économiste Mohamed Ould Mohamed El Hassan, directeur de l’institut 2irs.

Préambule

Dans ce livre que vous avez sous les yeux, nous essayons de
rendre compte, partiellement, de nos contributions civiques,
politiques et économiques, pendant la période allant du mois
d’Avril au mois d’Août de 2019.
Tout avait commencé par deux questions du brillant
journaliste K.Tocka, dans le cadre d’une interview avec
l’agence mauritanienne Initiative News.
Première question : « En juin 2019, la Mauritanie élira un
nouveau Président de la république et sortira normalement
de l’ère Mohamed Ould Abdel Aziz qui aura duré presque 11
ans. Quel bilan économique peut-on dresser de cette époque
et de ses réalisations au plan économique ?”
Deuxième question : Ould Abdel Aziz et ses partisans se
targuent d’avoir doté la Mauritanie d’infrastructures telles
que le nouvel aéroport, le nouveau palais des congrès, le
Centre National d’Oncologie(CNO) et de bien d’autres
structures. A quel prix ? A votre avis de tels ouvrages ont-ils
pu être réalisés au vu de la situation des populations dont une
bonne frange continue de dépendre des mesures
d’urgence ? »
La réponse à ces interrogations légitimes a nécessité plusieurs
semaines de recherche qui ont révélé ce que je ne pouvais pas
soupçonner et que personne, autour de moi, ne savait : la
quasi- faillite financière de notre pays, consécutivement à la
gouvernance d’une sinistre décennie 2009-2019.


Pourtant, durant ces dix longues années, mon ‘’travail’’ se
limitait à suivre et à accompagner les événements politico-
économiques dans mon pays, que je savais, globalement, en
détresse.
Les résultats des recherches qu’avait nécessité la réponse à
ces questions m’ont révélé, en effet, mon ignorance de ce qui
était advenu, au plan économique et financier, à mon pays.
Des manœuvres « officielles » continues avaient pour but de
distraire et de cacher le pillage et la liquidation économique
et financière de la Mauritanie au profit d’un homme et de son
clan, très restreint.
Que n’avait- on pas fait, en effet, pour distraire et détourner
l’attention de tout le monde ?
Les dialogues unijambistes , la fabrication ‘’ex nihilo’’
d’hommes et d’‘’oppositions anti-Opposition
démocratique’’, la stigmatisation de l’opposition
authentiquement démocratique, la stigmatisation par le sang
et des régions, la création des radios et TV, à ‘’la rwandaise’’,
pour faire distiller un nouveau discours raciste et haineux, le
« blasphèmiste M’ khaitir », la prolifération de la drogue et
des crimes, les visites officielles carnavalesques, à
l’intérieur du pays, dans le vilain dessein de charger les
écrans de Tv, la politique de communication par les
annonces démagogiques et des projets fictifs, la mise en
scène rocambolesque au Ministère de la Fonction publique !
Tout ce qui précède n’avait pour objectifs que de détourner
l’attention et de tromper la vigilance de l’opinion publique et
des élites, afin qu’elles n’aient ni le temps, ni la possibilité
technique de découvrir l’ampleur de la destruction, de la

liquidation et du transfert, vers des comptes étrangers, des
revenus de la Mauritanie.
Les fleuves d’argent, de dollars et d’euros, s’étaient, en effet,
déversés suite au quadruplement du prix des matières
premières exportées par notre pays (fer, cuivre, or, poisson)
gagnèrent le ‘’château’’ hermétique des liquidités de
MOAAZ et de son petit Clan.
Ces énormes revenus naturels et ‘’spontanés’’ de l’Etat
mauritanien n’ont pas empêché une nouvelle « propension du
Gouvernement à contracter des prêts concessionnels et à
s’engager sur un endettement en devises qui excède les
besoins et la capacité d’absorption de l’économie », selon la
Banque Mondiale.
Cette décennie aurait pu être celle des promesses du bonheur,
si cette manne exceptionnelle avait été utilisée pour favoriser
le sort des populations et leur préparer des lendemains
meilleurs.
Il n’en fut rien.
Les détournements des deniers publics, devenus le sport
favori des dirigeants, sont passés à des niveaux très
préoccupants et jamais atteints.
Les projets de développement n’étaient analysés ou étudiés,
par le Chef, qu’à travers le prisme du bakchich escompté. Les
fameuses « réalisations » n’étaient que des usines à créer des
commissions pour le clan et des dettes pour le pays,
aujourd’hui dans l’incapacité de les rembourser.
Avant le boom minier, l’Investissement Public – IP- se situait
autour de 30 milliards/l’an. Entre 2009 et 2014, il a quintuplé.

En 2015, le montant des Investissements dits Public s’est
élevé à 163 milliards dont le tiers, environ, fut financé sur le
budget de l’Etat mauritanien. Cette tendance ne fera que
s’affirmer en 2016 ; l’Etat assura le financement de la moitié
de l’investissement public qui a atteint un chiffre record de
261 milliards d’ouguiyas.
Les administrations centrales et territoriales, les services
sociaux ont été, sur toute la période, quasiment à l’arrêt, faute
de budget de fonctionnement. Seules les dépenses communes
opaques (fourre-tout, ‘’panse d’éléphant’’, comme on dit chez
nous) n’ont cessé de s’atrophier, malgré les mises en garde
répétées de l’Inspection Générale de l’Etat(IGE).
Pendant la moitié de la décennie (objet de ce bilan),
l’investissement public (IP) a représenté 40% du budget de
l’Etat et 25% de l’investissement total dans le pays. Les
subventions accordées par l’Etat au secteur public n’ont pas
été en reste, passant de cinq milliards, en 2005, à soixante-dix
milliards en 2013.
Nous avons constaté ici que l’investissement public qui aurait
dû constituer une solution aux problèmes de sous-
développement devint, au contraire, sous l’ère de MOAAZ, à
cause de sa mauvaise gouvernance, un grand problème à
résoudre et une source de préoccupations. La Banque
Mondiale l’a, même, attesté dans son rapport de Février 2018.
A la problématique de gouvernance des « réalisations », est
venue s’ajouter le revers de la médaille. En effet, la réalisation
de ces investissements, mal gérés, s’est traduite par
– un endettement excessif, en devises.

-une aggravation du déficit de la balance des paiements et par
la dépréciation de la monnaie.
Dans son rapport de Février 2018, la Banque mondiale a
révélé à ce sujet d’incroyables vérités : « entre 2007 et 2019,
les importations de biens et de services des sociétés
minières ont représenté 90% des exportations de minerais ».
En termes de flux, ces importations représentaient des flux de
sorties de devises qui annulaient presque entièrement les flux
entrants, générés par les exportations.
On comprend, dès lors, pourquoi le FMI nous apprend, dans
l’un de ses rapports, que « la Mauritanie reste le pays qui aura
le moins profité, durant cette période, de ses ressources
naturelles ».
Les investissements réalisés, durant cette décennie, ont été,
donc, trop importants, mais ont engendré de graves déficits
internes et externes, malgré les afflux financiers du boom
minier : un endettement excessif allant jusqu’à 99% du PIB
dont 96% de dettes libellées en devises.
Paradoxalement, durant cette période de vaches grasses,
2010-2014, la dette extérieure du pays a augmenté de 153%.
La Mauritanie, par son niveau d’endettement relatif (Dettes/
PIB), est devenue le 32ème pays le plus endetté au monde. Plus
flagrant encore, le 3ème pays africain le plus endetté, devant
le Zimbabwe qui occupe le 4ème rang.
La décennie a été si perverse qu’elle a conduit les services de
la dette à absorber une part importante des recettes
d’exportation et du budget de l’Etat.
Durant cette ère décennale, l’Etat, pour exécuter les
investissements, a souvent évincé le secteur privé formel pour

confier leur réalisation à des entreprises publiques, allant
jusqu’à représenter 35% du total des Investissements. Mais il
ne s’agissait que d’une combine qui permettait d’évincer, en
‘’première instance’’, les concurrents privés et de confier, en
définitive, la sous-traitance aux entreprises du clan
‘’moaasien’’ :mauritanien, chinois (et même marocain, cas du
fameux barrage de Seguelli).
En outre, ces ‘’Investissements’’, « réalisations » ont
‘’assommé’’ ou tué de nombreuses entreprises publiques :
Sonimex , Ener, Ader, Agence d’accès universel,
Amextipe….
Il fallait enterrer ou brûler des comptabilités trop
compromettantes. Les comptes de ces Entités publiques,
indiscrets par nature, justifiaient, donc, leur assassinat.
Ces fameuses « réalisations » n’étaient que des opérations
technico- financières douteuses, des ‘’chantiers’’ visant à
« légitimer » des marchés pour faire tourner les
firmes « Moaasiennes ».
En effet, si ces réalisations avaient fait l’objet d’une
conception économique et financière honnête, des études de
faisabilité et de rentabilité, on aurait, normalement, renoncé,
avant tout commencement, à leur exécution.
Que reste -t-il, aujourd’hui, de cette frénésie commerciale,
sous couvert des fameuses réalisations, trop visibles, sinon
une montagne de dettes, des éléphants blancs, la mystification
des gens et la poudre aux yeux de ceux qui ne sont pas au
courant des réalités économiques et financières très lisibles,
mais souvent invisibles.

Notre étude critique et analytique, diffusée, en Avril 2019, par
les médias mauritaniens qui n’a éclairé qu’une petite partie de
‘’l’iceberg- décennie’’ a eu, en Mauritanie et auprès de la
diaspora, l’effet d’un « coup de tonnerre dans un ciel serein. »
Mais il ne s’agissait que de quelques constats sidérants,
terribles qui n’avaient pas besoin d’être expliqués ou
explicités. Il avait suffi de les révéler pour que se produise un
électrochoc pour l’Opinion publique, pour les élites et pour
les partis politiques.
Plus patriotes qu’on ne les dit, les mauritaniens (anciens
Présidents, anciens Ministres, anciens Ambassadeurs,
journalistes, recteurs d’universités, hommes politiques,
hommes d’affaires, professeurs, ingénieurs, jeunes et moins
jeunes, hommes femmes.) firent, par milliers, la ruée, pour
s’abonner à mon WhatsApp, pour prodiguer leurs
compliments, leurs félicitations et pour réclamer davantage
d’études de vulgarisation.

Les partis politiques qui militent depuis des décennies pour
une démocratie véritable m’invitèrent à une conférence
publique pour justifier, pour l’opinion et pour le Parlement, la
nécessité d’un audit économique et financier de ladite
décennie. Bien évidemment, j’y répondis positivement.
C’est l’occasion, pour moi, d’exprimer, ici, mon entière
gratitude et mes vifs remerciements à ces milliers de mes
concitoyens (nes) patriotes.
Pour cerner les différents contours de cette gouvernance
décennale, aveugle et despotique, aux conséquences
dramatiques, il fallait donc mener des études approfondies et
des recherches économiques, financières poussées, dans tous
les secteurs et au niveau de toutes les entreprises publiques.

(A Suivre)

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