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Redresser la barre

1. L’état des lieux

Des agressions abjectes et récurrentes contre les plus démunis des Mauritaniens:

des femmes et des enfants, sans abri, sans support, sans défense; la banalisation médiatique de l’apologie du crime raciste et haineux, sous le prétexte fallacieux d’ouverture politico-démocratique ; une recrudescence du tribalisme, du “frangisme” et de l’influence surannée des entourages privés des hauts responsables du pays;

le retour en force des hommes de la période d’exception (PRDS) et de leurs prestidigitations nocives (crise de la “référence” à l’UPR), ces prestidigitations contre lesquelles le pays se croyait être définitivement à l’abri;

un paradoxe politique difficilement explicable: une majorité qui, au lieu de s’en tenir à la mise en œuvre scrupuleuse du programme électoral (en droite ligne du bilan de la « décennie ») sur la base duquel elle fut élue lors des dernières échéances électorales, s’active ostensiblement à en appliquer « l’antithèse », le programme de l’opposition (ce programme rejeté, en son temps, par le corps électoral de ce pays), déstabilisant ainsi cette opposition hétéroclite, au point de la « museler » et de perturber, par ricochet, le fonctionnement régulier d’institutions publiques clés ;

une flambée exponentielle des prix des denrées de première nécessité, menaçant de réduire à néant le petit noyau de classe moyenne multiraciale, notamment des fonctionnaires, seul garant plausible de la cohésion sociale du pays et de sa stabilité politique, et faisant planer le spectre de la famine sur les zones les plus marginalisées du territoire, loin des projecteurs et des micros;

une politisation sélective du thème de la lutte contre la gabegie, au moment où un faisceau d’indicateurs convergent pour révéler la recrudescence, au vu et au su de nombre d’observateurs, des pratiques népotistes, corruptrices et prévaricatrices; des accointances affichées avec la composante ultra-conservatrice du paysage partisan national; une prolifération des discours irrédentistes sur les réseaux sociaux; l’épineux dossier de la drogue et sa facture sociale et sécuritaire, etc.

2. Quelques actions de “salubrité publique”

Face à un tel tableau sombre, vu le contexte géopolitique agité qui est aujourd’hui le nôtre et en consolidation de la stabilité institutionnelle du pays, il convient de redresser la barre.

La responsabilité, toute la responsabilité morale et politique repose sur l’actuel président de la République, seul garant, devant Dieu et au vu du serment prêté en faveur du respect pointilleux des dispositions pertinentes de la loi suprême du pays, de la préservation des intérêts vitaux du pays, spécialement ceux des plus démunis, des plus vulnérables, des sans voix.

Pour ce faire, la première urgence, pour le président de la République, devrait consister à juguler les menées clivantes et subversives de ceux qui avaient provoqué l’échec de certains de ses prédécesseurs; car, au pouvoir, une élite essentiellement composée de médiocres “hirba-iyine” (caméléons ) peut certes s’adapter à n’importe quel environnement, d’un point de vue chromatique et physique, ou redéployer, à la commande, son sinistre “écran de fumée” laudateur, mais ne peut guère contribuer significativement à bâtir un État moderne, juste et prospère.

Le pays regorge de talentueux jeunes cadres à même de prendre avantageusement la relève; il convient de leur en offrir l’opportunité. La deuxième urgence devrait viser à corriger le paradoxe politique susmentionné, en dialoguant, certes, avec l’actuelle opposition amorphe, mais aussi en suscitant l’espoir chez ceux qui souffrent le plus parmi les citoyens de ce pays, via une évaluation méticuleuse, sans tabou ni complaisance, des enjeux sécuritaires actuels et en y apportant des réponses tangibles et quantifiables sur le terrain ; la résurrection de l’espoir pourrait aussi consister à convoquer des élections municipales ou régionales ou parlementaires anticipées, dans le dessein de permettre aux populations de choisir des représentants au diapason de leurs préoccupations et problèmes actuels, après que des événements majeurs, telle la crise aiguë liée à la COVID-19, ont bouleversé le contexte national, régional et international.

Plus prosaïquement, il serait souhaitable de “réhabiliter” les boutiques «Emel», via leur ravitaillement régulier et en quantités suffisantes et l’augmentation de leur nombre, à l’effet de soulager les contraintes vitales quotidiennes des plus démunis d’entre nous.

En guise de conclusion, je souhaiterais affirmer que la tentation aujourd’hui perceptible, consistant à “casser le thermomètre” en réprimant toute velléité d’expression pacifique, cette précieuse “soupape de sécurité” (spécialement en “période de vaches maigres”), du désarroi populaire actuel, non seulement ne fera pas baisser la “fièvre”, mais risque fort d’engager le pronostic vital du “patient”.

Isselkou Ahmed Izid Bih Néyé

Universitaire

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