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Aid El Adha/Nouakchott : la flambée des prix du bétail met les familles à rude épreuve

À deux jours de la fête de l’Aid El Adha (Tabaski), prévue pour le samedi 07 juin 2025, Nouakchott, la capitale mauritanienne vit au rythme des derniers préparatifs. La réalité est que Nouakchott se prépare pour la fête du sacrifice dans un contexte marqué par une flambée des prix des moutons.

A El Mina, entre le carrefour Nancy et le célèbre Marbâtt, les points de vente de bétail battent leur plein. Des parcs principalement occupés par des vendeurs de moutons. Entre odeurs de paille, d’aliments de bétail, cris de vendeurs et bourdonnement des véhicules, de tricycles et de motos, l’effervescence est palpable. Les négociations s’enchaînent, les avis divergent, mais chacun compte repartir avec un mouton , en fonction de ses moyens.

Pourquoi une telle cherté ?

Si certains acheteurs repartent enchantés, du côté des vendeurs, les échanges se révèlent parfois tendus. Le décalage entre le coût d’acheminement des bêtes et les attentes des acheteurs est régulièrement pointé du doigt. Parmi les commerçants Hemou venu des environs de l’Assaba avec un important troupeau, exprime son émotion.

« J’ai amené environ 220 moutons depuis Kiffa et Guérou. Cela fait une semaine que je suis là. Les clients sont nombreux, mais leurs propositions ne sont pas commodes. Ils veulent des moutons à 5 000 ou 6000Mru alors que certaines bêtes ont été achetées entre 7800 et 8900 MRU et ce n’est pas possible de les vendre moins. Mais, aujourd’hui, j’ai pu vendre une quarantaine entre 1000 et 12000 MRU », a-t-il confié.

Même sonne de cloche au point de vente situé au Carrefour de l’Amitié, où les béliers dominent le décor. Vendeur de moutons en provenance du Hodh oriental explique pourquoi les prix ont connu une hausse cette année.

« Le prix du mouton a augmenté sur les marchés de l’intérieur, et nos fournisseurs nous vendent les moutons plus chers. On n’a pas le choix, actuellement, pour avoir un mouton, il faut compter à partir de 7900MRU et y ajouter les frais de transport et de nourriture. Si les coûts de transport et les taxes étaient moins chers, ça aiderait beaucoup. Mais bon, malgré les l’importance des frais, je suis satisfait à 80 % de mes ventes », explique-t-il.

La relation entre l’offre et la demande

Partant des principes de l’offre et de la demande, les frais ont un impact sur les prix. Transport, alimentation du bétail, les charges sont multiples et importantes . Sur ce point, un membre de la fédération des commerçants et éleveurs raconte.

« Il y a beaucoup de bêtes cette année mais les prix fixés par les vendeurs sont très élevés. Ils varient entre 8000, 9000,12000 et 12500MRU. Certains clients trouvent cela excessif. Ce qu’il faut retenir, c’est que les prix affichés ne sont pas à la portée de n’importe qui. Il suffit de passer au marché pour s’inquiéter.

La tradition du sacrifice

« En plus de l’importance des frais, la fête de l’Aïd El Adha reste avant tout un moment de foi. L’acte du sacrifice est un pilier religieux, et sa dimension reste bien dans les esprits », explique un érudit. Il a précisé la portée spirituelle pour le fidèle de sacrifier une bête le jour de l’Aid. « Lorsqu’on égorge une bête le jour de la fête, ce n’est pas la consommation qui compte. C’est l’au-delà. Allah va mesurer votre récompense sur l’animal sacrifié.

Depuis une semaine, les marchés de bétail dans les différents quartiers de la capitale voient affluer toujours les commerçants de bétail, de clients, et de négociations. L’atmosphère est à la fois tendue et pleine d’espoir.

Entre les exigences de la fête, les besoins des familles et les réalités économiques des clients, chaque père ou mère de famille s’efforce de préparer cette fête avec honneur et dignité. Et sous un soleil chaud, au milieu des bêlements des moutons les débats et les transactions se continuent.

Des pères de famille témoignent

Il est 10 h, mercredi 4 juin, Marbâtt ne désemplit pas avec les va et vient de éventuels acquéreurs. Des dizaines de moutons bêlent ensemble sous le soleil. On compte certains aux cornes dressées, ruminent tranquillement. Dans cette ambiance, vendeurs et acheteurs apprécient, discutent, et parfois concluent l’affaire.

Mokhtar, un cadre, content de son achat d’un mouton. « Je suis venu pour acheter un mouton gras. J’ai trouvé un mouton gras et en bonne état. J’ai pu négocier à 9500MRU. Crois-moi, les moutons sont très chers cette année. Il y a même des moutons à 8000, 9800 et 12000MRU. J’appelle les clients à venir voir », a-t-il souligné, habitant de Tevragh-Zeina. Il affiche une nette satisfaction de sa ronde au marché.

« Je suis venu avec mes enfants. Nous avons pu acheter un mouton à 9500 MRU, certains vont jusqu’à 12500MRU. Il faut reconnaître que les prix sont vraiment élevés. Nous avons constaté qu’il y a plus de spectateurs que d’acheteurs. En fonction de votre budget, vous êtes vite limité dans le choix », raconte Souleymane.

Et, son ami et voisin, ajoute « un petit mouton coûte au minimum 8000MRU. Pour espérer un gros mouton, il faut venir très tôt avec 9500 ou 10000MRU en poche. C’est comme si vous allez acheter un chameau ou un bœuf ! C’est vraiment pénible pour un fonctionnaire ».

J’appelle les autorités publiques pour qu’elles s’impliquent afin de rendre les prix plus abordables, surtout à l’occasion de l’Aïd El Adha, comme le font certains pays qui prennent des dispositions et des mesures pour aider leurs citoyens. Sinon, un jour viendra, où, il ne sera possible de se procurer un mouton pour la fête ».

Maimouna, enseignante, mère de 3 enfants, dénonce une spéculation qui fragilisent le pouvoir d’achat des ménages. Et, elle dit « face à cette situation, les autorités ainsi que les fédérations de consommateurs sont vivement appelées à encadrer les prix afin de garantir un accès équitable à ce rite religieux, pour que la dimension spirituelle ne soit pas étouffée par les contraintes économiques ».

Par Aboubakrine SIDI/F.A

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