«Make Iran Great Again» : Donald Trump brandit la menace d’un «changement de régime» à Téhéran

JD Vance, Marco Rubio et Pete Hegseth avaient assuré dimanche que les frappes américaines en Iran n’avaient pas pour objectif de faire tomber la République islamique, avant d’être contredits quelques heures plus tard par leur président.
Les frappes américaines sur les installations nucléaires iraniennes «n’avaient pas pour objectif un changement de régime», a assuré le secrétaire de la Défense Pete Hegseth, lors d’une conférence de presse destinée à détailler l’opération «Midnight Hammer», dimanche 22 juin.
Quelques heures plus tard, le chef de la diplomatie américaine Marco Rubio lui a emboîté le pas sur les plateaux des chaînes Fox News et CBS : «Cette mission était très précise, avec trois sites nucléaires pour objectifs : ce n’était pas une attaque contre l’Iran ou son peuple, ni une tentative de changer de régime.» Enfin, le vice-président J.D Vance a réaffirmé sur NBC que la position des États-Unis avait été «très claire» : «Nous ne voulons pas d’un changement de régime.»
Malgré ces nombreuses prises de parole, le président américain a finalement évoqué en fin de journée l’idée d’un «changement de régime» en Iran, dans un post sur Truth social. «Il n’est pas politiquement correct d’utiliser le terme “Changement de régime”, mais si le régime iranien actuel est incapable de RENDRE L’IRAN GRAND À NOUVEAU, pourquoi n’y aurait-il pas un changement de régime ???», a-t-il écrit, transformant son célèbre slogan «Make America Great Again» en «Make Iran Great Again».
«Laisser planer l’incertitude»
Cette déclaration est-elle le signe d’un désaveu envers ses plus proches fidèles au sein de son administration ? Pour Yannick Mireur, politologue spécialiste des États-Unis et auteur de Populisme Smart (Éditions VA), ce changement de discours de Donald Trump s’inscrit dans une stratégie plus large de négociation. Elle vise à «laisser planer une incertitude du côté de la partie adverse», explique l’expert.
«Il a fait la même chose quand il a déclaré il y a quelques jours vouloir attendre deux semaines avant d’attaquer les sites nucléaires iraniens. Et ce, alors que le projet de cette intervention, très confidentiel, devait être sur la table depuis plusieurs semaines», illustre le spécialiste.
Yannick Mireur reconnaît néanmoins que le président américain fait régulièrement preuve d’«impulsivité» dans ses réactions publiques et estime que sa prise de parole de dimanche lui a permis de «réaffirmer qu’il restait le décideur ultime».
Menace d’employer la force
La proposition de «changement de régime» iranien par Donald Trump apparaît par ailleurs comme «un pas de côté» par rapport à ses promesses de campagne, note Yannick Mireur. Durant sa course à la présidence, le milliardaire américain avait insisté sur la nécessité de ne plus s’engager dans des guerres «sans fin» ou «éternelles».
Sa décision d’attaquer les sites nucléaires iraniens a donc été critiquée par certains républicains. À l’instar de Thomas Massie, membre de la Chambre des Représentants (Kentucky), qui l’a jugé d’anticonstitutionnelle.
Certes, depuis son retour à la Maison-Blanche, Donald Trump tient un discours «davantage en faveur de la paix que de la guerre» évoquant par exemple, dans le cadre de la guerre en Ukraine, la nécessité «d’épargner la vie des soldats». Pour autant, cette paix peut s’obtenir «par la force», avait-il affirmé il y a un mois lors d’un discours en Arabie saoudite – avant d’ajouter : «J’espère que nous n’aurons pas à le faire.»
À travers cette expression «nous croyons à la paix par la force», Donald Trump reprend, «peut-être sans le savoir, l’idée d’une expression de Theodore Roosevelt “Parle doucement et porte un gros bâton, tu iras loin” (Speak softly and carry a big stick, you will go far)», décrypte le spécialiste qui estime que «cela signifie qu’il n’hésite pas à brandir la menace de la force pour pousser son adversaire à la négociation.» Ainsi, en menaçant de faire tomber le régime des Mollahs – et en attaquant leurs sites nucléaires -, Donald Trump espère pouvoir ramener l’Iran autour de la table des négociations et ainsi éviter une intervention militaire sur le sol iranien.
Lundi, le président américain s’est d’ailleurs dit «toujours intéressé» par une solution diplomatique, tout en invitant «le peuple iranien» à «retirer le pouvoir à ce régime incroyablement violent» s’il «refuse de s’impliquer» dans les discussions.
Le Figaro/Par Clara Hidalgo